Cellules d’Ostreopsis cf. ovata – reference Rossella Barone 2007
Kevin Drouet vient d’obtenir sa thèse à l’Ifremer en étudiant les microalgues, une en particulier du genre Ostreopsis qui est toxique et dangereuse pour la santé humaine, sujette à de soudaines proliférations vraisemblablement liées à la hausse des températures océaniques.
Présentation de la thèse de Kevin Drouet sur le site de l’Ifremer
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Le monde des microalgues est extrêmement vaste et varié : diatomées, cyanobactéries, Alexandrium, Dinophysis… certains noms nous sont vaguement familiers mais nous sommes nombreux à ignorer leur diversité. Qui sait par ailleurs que ces végétaux qui vivent de la photosynthèse produisent une bonne part de l’oxygène que nous respirons ? En outre, elles captent aussi le carbone… Nous leur devons beaucoup. Ce phytoplancton nourrit de nombreux animaux marins et finissent par nous alimenter également indirectement.
Souvent unicellulaires, les algues microscopiques sont la plupart du temps invisibles à l’œil nu mais quand elles se regroupent et se multiplient (par simple division cellulaire) des phénomènes bien notables apparaissent : marées rouges, tapis gluants, etc. Les « blooms » ou efflorescences algales sont des proliférations rapides et importantes de microalgues. Parfois, elles ont des conséquences néfastes sur le milieu dans lequel elles prolifèrent : les bactéries qui les dévorent peuvent capter tout l’oxygène et asphyxier les autres espèces animales et végétales alentour.
Les « blooms » de microalgues et le changement climatique
Les efflorescences algales se multiplient dans tous les océans de la planète. On suppose donc qu’elles sont liées au changement climatique. Encore faut-il le vérifier.
Pendant sa thèse de doctorat à l’Ifremer, Kevin Drouet s’est intéressé en particulier à une microalgue du genre Ostreopsis : un dinoflagellé qui se fixe à d’autres algues – plus grosses – du fond marin côtier, à faible profondeur, en fabriquant un mucus visqueux qui permet aussi les « amas » avec ses congénères. Les chercheurs se penchent sur Ostreopsis pour deux raisons.
D’abord, cette algue microscopique renferme une toxine dangereuse pour la santé humaine. En contact avec la peau, elle provoque des irritations et lorsqu’elle est inhalée (par effet d’aérosol, quand des gouttelettes s’envolent), elle entraîne fièvre, toux, nausées, rhume, conjonctivite, troubles respiratoires… Prévenir les proliférations d’Ostreopsis peut déjà permettre d’éloigner les baigneurs et de fermer les plages concernées par le phénomène.
Kevin Drouet s’est cependant intéressé à l’un des paramètres qui pourrait expliquer les blooms d’Ostreopsis : la variation des températures. Et en effet, il a pu constater que plus les températures de l’eau marine étaient élevées, plus les proliférations d’Ostreopsis étaient précoces (pas forcément plus durables ni plus intenses). Même si d’autres facteurs interviennent sans doute (état écologique de l’eau, mouvements de l’eau, luminosité, salinité, acidité, présence d’autres espèces prédatrices ou auxiliaires, etc.), le lien entre température océanique et efflorescences algales semble donc établi. Ainsi, les blooms s’annoncent à la fois comme des conséquences et des indicateurs de changement climatique.