Après les élections législatives et l’élection des députés en France, tournons-nous vers les eurodéputés et examinons avec Breizh Europe Finistère le rôle et le fonctionnement du Parlement de l’Union européenne.

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Par Maël Cordeau, président de Breizh Europe Finistère

Avant d’expliquer le fonctionnement actuel, il convient de revenir sur quelques éléments historiques clés de la mise en place de l’appareil législatif européen.
Sa première apparition date de 1952 suite à la création de la communauté européenne du charbon et de l’acier. Le parlement s’appelle alors Assemblée commune et compte 78 membres issus des chambres parlementaires nationales des six Etats membres fondateurs. Là, les membres peuvent sanctionner l’autorité exécutive, une sorte d’ancêtre de l’actuelle Commission, de la CECA. En 1957 avec le traité de Rome apparaît le terme d’assemblée parlementaire européenne qui n’est que consultative. Il y a cette fois-ci 142 membres toujours issus des chambres parlementaires nationales. En 1962, le nom change et devient celui que l’on connaît aujourd’hui : Parlement européen.

Ce n’est que 17 ans après qu’arrive le moment de faire élire les membres du Parlement européen au suffrage universel direct, la première élection se tient en 1979 et fait élire 410 députés pour 5 ans. Pour rappel, Simone Veil devient la première personnalité élue à la tête du Parlement, un véritable symbole. A partir de ce moment et du fait des élargissements successifs, le nombre de députés n’a cessé d’augmenter jusqu’à atteindre 751 avant le brexit. Aujourd’hui on ne compte que 705 députés, les autres sièges étant gelés pour de probables futurs élargissements.
Ainsi vous l’aurez compris, les députés sont les représentants directs des citoyennes et citoyens de l’Union européenne. De fait, le Parlement européen dispose d’une place très importante dans le triangle institutionnel puisqu’il porte la voix des Européens.

Comment les parlementaires portent la voix des Européennes et Européens

Le coeur névralgique du Parlement européen repose sur les europarlementaires. En effet, les députés répartissent leurs temps entre diverses activités. A Bruxelles et Strasbourg, ils travaillent avec les autres députés de leurs groupes politiques. Ils sont aussi amenés à rencontrer les lobbys afin de construire leurs textes et amendements en vue des votes en plénière.
Des eurodéputés peuvent aussi se porter candidats à la tête de commission de travail entre europarlementaires, commission pêche, commission commerce international, commission défense et sécurité, etc.  Les europarlementaires, comme les députés de l’assemblée nationale disposent d’une enveloppe qui leur permet d’avoir des assistants et des frais de mission. Certains eurodéputés font le choix d’avoir une permanence proche de leur lieu de résidence. Une manière d’ancrer leur présence localement et être au plus prêt des acteurs locaux. On peut alors se poser la question de cette position puisqu’on parle de députés européens, ne devraient-ils pas parcourir l’Union européenne constamment pour rencontrer les autres citoyennes et citoyens ? La question reste ouverte. Nous allons y revenir notamment au regard des élections de 2024 qui pourront peut-être en partie répondre à cela. Cette activité de rencontre, discussion et aussi participation à des initiatives locales dans les circonscriptions permet aux eurodéputés de revenir à Bruxelles et Strasbourg avec de la matière qui émane des citoyennes et citoyens. Tout cela leur sert une nouvelle fois dans la partie du travail législatif qui se passe aussi en lien avec les autres institutions. Cela s’appelle le trilogue, le but est de parvenir à un accord provisoire sur un texte acceptable par le Conseil et le Parlement, c’est une partie du travail de co-législation, dont nous allons parler plus tard.

Ce qui est décrit ici, correspond en quelque sorte au quotidien idéal de l’euro parlementaire, il n’y a pas d’obligation de procéder de cette façon. C’est d’ailleurs
pour cette raison que le Parlement européen a pu être qualifié, en particulier en France de maison de retraite, puisque l’un des seules obligations est d’être présent au plénière qui ont lieu à peu de chose prêt une fois par mois. Mais ceci est nettement moins le cas depuis 2019.

La fabrique de la loi européenne

La première des choses à comprendre est que le Parlement européen est co-législateur et cela depuis 2009 avec le traité de Lisbonne. C’est-à-dire qu’il légifère en parallèle du Conseil de l’Union européenne, que l’on appelle aussi le conseil des ministres de l’Union européenne, c’est d’ailleurs dans ce conseil que s’exerce la présidence tournante qui va revenir à la Suède le 1er juillet prochain et qui était à la France depuis janvier.
Revenons au Parlement européen, qui via la procédure législative ordinaire qu’on appelle aussi dans le jargon PLO, vote les propositions législatives de la Commission européenne. Néanmoins le Parlement européen n’est pas compétent dans tous les domaines, ce dernier peut légiférer sur la gouvernance économique, la liberté, la sécurité et la justice, l’énergie, les transports, l’environnement, la protection des consommateurs, la PAC. C’est ainsi que naissent les avis, recommandations, règlements et directives puisqu’on ne parle pas de lois mais d’actes juridiques de l’Union européenne.

Il existe des domaines dans lesquels le Parlement européen ne dispose que d’un rôle consultatif c’est le cas des politiques liées à la concurrence. Dans le cadre de
procédure d’adhésion ou de retrait de l’UE, le Parlement donne simplement son avis.

D’autres prérogatives du Parlement européen

Parmi les autres pouvoirs du Parlement européen, il y a à chaque élection européenne le pouvoir d’investiture de la Commission européenne. Encore une fois, depuis le traité de Lisbonne en 2009, le Parlement dispose de plus de pouvoir dans la désignation du président de la Commission européenne puisque le candidat proposé par le Conseil européen est soumis au vote. Le président de la Commission européenne a été en 2014 la tête de file du parti vainqueur de l’élection et le candidat choisi, c’est le fameux système allemand du Spitzenkandidat . En 2019, la candidate choisie a résulté de discussions entre chefs d’États et chefs de gouvernement et a été élue par le Parlement.
Il y a un autre point important relatif à la Commission européenne. En effet, tous les commissaires proposés par les pays membres sont soumis à des auditions devant des commissions du Parlement européen, qui peut refuser des candidats. Par exemple, la France avait proposé Sylvie Goulard qui a été refusée du fait d’une affaire judiciaire.
Le Parlement européen a également le pouvoir d’adopter une motion de censure et faire démissionner l’ensemble des commissaires si la procédure devait aboutir mais
cela n’est pas encore arrivé.
Aussi, le Parlement peut ouvrir des commissions d’enquêtes temporaires pour examiner des infractions ou mauvaises applications du droit de l’Union européenne notamment dans les Etats membres.

Le poids politique du Parlement européen est relatif

D’un côté le Parlement européen dispose d’un pouvoir puissamment symbolique par exemple lorsque les députés votent à la majorité le OUI à l’ouverture de la candidature de l’Ukraine à l’Union européenne c’est un message extrêmement fort mais le revers de la médaille fait que ce vote n’est qu’un avis . Néanmoins la Commission européenne et le Conseil européen ne peuvent pas l’ignorer. Dans les exemples récents où le Parlement européen a eu un poids politique important sur les impulsions de la Commission européenne, c’est par exemple le sujet Ouïghours en Chine. En effet, la mobilisation parlementaire et dans une moindre mesure, la mobilisation citoyenne ont été telle que la Commission européenne a proposé d’interdire aux frontières de l’espace Schengen tous les produits issus de l’esclavage. Une impulsion qui auparavant aurait pu prendre
plusieurs années avant d’être lancée.

Les prochaine élections européennes

Ce qui est sûr c’est que l’élection va avoir lieu en 2024, il y a une volonté qu’elle se déroule le jour de la Fête de l’Europe c’est-à-dire le 9 mai. Mais rien n’est arrêté parce que cela induit beaucoup de complications. Chaque Etats membres disposent de son jour traditionnel pour voter, souvent le scrutin s’étale du jeudi au dimanche. Il faudrait donc accorder tout le monde sur un seul et même jour pour ce faire. Il est aussi proposé d’instaurer un jour férié pour répondre à cette problématique. D’autres idées sont au sujet du vote par correspondance, ou alors permettre aux citoyennes et citoyens d’avoir un vrai poids dans le choix du ou de la présidente de la Commission européenne.
Le but de cette élection de 2024 est clairement de redonner un autre souffle à l’Union européenne. Bien que les différents événements internationaux des dernières années ont démontré la capacité de l’UE à agir et réagir de plus en plus vite et fort. Le covid-19 étant le premier élément déclencheur, puis le Green Deal, maintenant l’invasion de l’Ukraine.
Pour revenir aux élections, il convient de rappeler le processus du scrutin. Premier point, chaque Etat membre choisit comment le scrutin se passe chez lui. En France avant 2019, il avait une liste par parti politique par grandes régions (Grand Ouest, Nord, Paris, Sud Ouest, etc.). En fonction des résultats, ont compose la liste des
eurodéputés envoyés au Parlement européen. En 2019, les règles du jeu changent en France et les listes deviennent nationales, c’est-à-dire que chaque parti dispose d’une seule liste pour tout le territoire national.
La répartition dans le Parlement se fait toujours à la proportionnelle. Cela soulève la question de la représentativité des territoires alors qu’on connaît l’importance de la
place des régions européennes. D’ailleurs en 2019, en France et cela fait écho à l’actualité politique française, c’est l’extrême droite qui a remporté l’élection européenne. C’est aussi la France et l’Italie qui ont, à peu de chose, envoyé le plus de députés d’extrême droite pour représenter les citoyennes et citoyens de l’Union européenne.

On ne sait pas encore comment cela va se dérouler en 2024. La seule chose qui est réellement en débat et qui émane de la Consultation sur l’avenir de l’Union européenne, c’est le fait que chaque personne pouvant voter aura deux voix. La première restera la même qu’avant, la seconde sera pour une liste paneuropéenne ou transnationale qui sera composée par les formations politiques au niveau européen. Par exemple, un parti pourra composer une liste avec des candidats de chaque Etat membre dans le but de gagner des sièges supplémentaires au Parlement. Il y en aura 28 supplémentaires. Ces listes promettent la naissance de vraies campagnes politiques européennes notamment au sujet d’enjeux qui concernent l’ensemble des Etats membres. Cela pose une nouvelle dimension européenne, qui devra toujours s’inscrire dans l’intérêt des citoyennes et citoyens.