Les associations de protection de la nature comme Bretagne vivante agissent sur le terrain sauvage… et sur celui de l’application des lois. Le droit de l’environnement est un domaine vaste et passionnant qui est aussi un outil de travail, comme nous l’explique Mogane Quintard, la juriste de Bretagne vivante.
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Le droit de l’environnement est un droit très vaste puisqu’il peut concerner des domaines aussi variés que l’industrie, l’économie, l’agriculture, la santé, les espèces sauvages, l’eau… à des échelles diverses, du droit international aux réglementations très locales. On peut dire qu’il est né progressivement au XXe siècle. Dans les années 1970 sont nées la convention internationale Cites qui régit les espèces menacées ; c’est aussi à cette époque qu’on a vu apparaître les lois liées aux pollutions des milieux et qu’on a généralisé les droits liés à l’environnement : loi sur la nature et loi sur les installations classées en 1976. Depuis 2005, la charte de l’environnement a valeur constitutionnelle et cela a marqué une étape importante. Le code de l’environnement date de 2000 et il regroupe les textes de loi relatifs à cette question. C’est un outil très utile aux juristes comme Morgane Quintard, la juriste de l’association Bretagne vivante.
Un droit de l’environnement construit autour des intérêts humains avant tout
Les associations de protection de l’environnement ont en effet beaucoup recours au droit pour faire valoir la cause des êtres vivants non humains et des milieux sauvages. Même si ces derniers ne sont pas « sujets de droit » à proprement parler. Les anguilles, pourtant quasiment éteintes, ne sont pas défendables en elles-mêmes ; d’autres pays attribuent pourtant une personnalité juridique à des éléments naturels mais ce n’est pas le cas en France.
Le droit de l’environnement en France s’est largement construit autour de la santé, marquant malgré tout la vision que les humains sont bel et bien dépendants de l’état des milieux naturels qui les entourent. On a donc défini par exemple un classement des activités économiques en fonction de leur dangerosité dans la loi sur les installations classées pour la protection de l’environnement (1976). D’autres textes sont apparus aussi au gré des catastrophes humaines et écologiques (loi Risques après la catastrophe d’AZF à Toulouse).
Prévention et répression en droit de l’environnement
Le droit de l’environnement contient à la fois un volet préventif et un volet répressif. Les associations comme Bretagne vivante agissent donc sur les deux tableaux.
Quand elles estiment qu’un projet menace des milieux (espèces sauvages rares, risques de pollutions) elles peuvent s’adresser au tribunal administratif ; ce peut-être le cas pour des projets industriels : extensions d’élevage, usines de méthanisation, ou d’urbanisation ou de voirie. Idem quand un préfet autorise une dérogation à la protection d’espèces, comme pour les Choucas des tours, protégés mais dont l’abattage est parfois autorisé en Bretagne quand ils prolifèrent et s’attaquent en récolte. Bretagne vivante peut alors attaquer la dérogation. Dans tous les cas, l’issue du recours juridique reste incertain et l’appréciation des juges tient une grande place.
Au pénal, les associations comme Bretagne vivante se portent partie civile quand les faits sont en lien avec leurs actions. Ainsi, quand des braconniers de civelles (jeunes anguilles, dont la pêche est très réglementée) l’association demande des dommages et intérêts qu’elle obtient généralement (car au pénal les faits sont souvent bien établis) et qui vont servir à financer son action. Bretagne vivante se fait alors assister par des avocats spécialisés.